Je fais remonter ce topic...
Pas encore tout lu, mais une bonne partie quand même. Bon évidemment, il y a du boulot : beaucoup d'articles et d'interviews, beaucoup de documents iconographiques intéressants... Ce (très) gros livre manquait dans le paysage bibliographique des musiques du Massif Central. Donc ça y est, il est écrit et publié, et c'est déjà une bonne chose ! Sans avoir tout lu, j'ai déjà beaucoup appris.
Pourtant, je ne peux m'empêcher d'exprimer ici une certaine déception quant à l'équilibre des différentes parties de l'ouvrage. La partie sur les cornemuses, rédigée en grande partie par Eric Montbel, est très bien documentée et fort intéressante ; celle sur le violon, rédigée par Olivier Durif, est remarquable (quelle synthèse de la pratique du violon en Massif Central !!!) ; en revanche, celle sur l'accordéon est très incomplète. Ca me choque peut-être d'autant plus que je joue de l'accordéon chromatique, mais quand même : dans la partie "violon", Olivier Durif rédige des biographies pour tous les violonistes marquants alors que, dans la partie "accordéon", des musiciens majeurs "historiques", comme Joseph Aigueperse, ne sont même pas cités. Et pour ceux qui sont cités (Momboisse, Pradal, Plane, Bras...), rien n'est dit sur eux : ils sont juste cités ! Quant aux grands accordéonistes chromatiques de l'Aubrac contemporains des collectes des années 70-80 (Jean Pons, Jean Perrier, Marcel Pelat...), ils ne sont pas mentionnés. Jean Vaissade est tout de même évoqué, et Roger Vaissade a le droit a une photo (mais avec une mauvaise légende : "Jean Vayssade"...). Par contre, gros article sur Jean Ségurel, le plus médiatique des accordéonistes chroma mais pas le meilleur interprète malheureusement.
Passé l'étonnement, il est bien sûr facile de comprendre ces manques. Ce gros livre a essentiellement été rédigé par les acteurs du revivalisme des années 70-80, ce qui est souvent gage de rigueur, de qualité et de vérité (par exemple, quand Montbel détruit l'image de la cabrette comme la cornemuse emblématique du Massif Central alors que cette hégémonie masque la présence d'autres cornemuses plus anciennes sur le territoire) ; ça devient problématique quand il s'agit de parler de l'accordéon car, on l'a déjà rappelé plusieurs fois sur Tradzone, les folkeux détestaient le chromatique, à tel point qu'il n'y a pratiquement pas eu de collectage de joueurs d'accordéon chromatique en Massif Central à cette époque. Cette guéguerre diato / chroma est présente partout dans les pages concernant l'accordéon : je me suis amusé à compter le nombre de diatos en photo par rapport au nombre de chromas... sans surprise, les diatos sont largement gagnants ! On ne va pas revenir sur l'image que se coltinait le chroma dans les années 70-80, et le mépris du chroma à cette époque est compréhensible ; mais qu'il n'y ait quasiment rien d'écrit sur la pratique du chromatique en Aubrac dans un ouvrage rédigé en 2014... plus de 40 ans après les premières collectes........ C'est ça le pire je crois : aucun mea culpa, aucune autocritique, nulle part. J'aime quand Olivier Durif admet et écrit qu'il y a eu des zones de jeu de violon où les collecteurs ne sont pas allés, pour des raisons multiples, et que c'est fort dommage. J'aurais aimé que quelqu'un écrive quelque chose d'équivalent pour rendre hommage à tous les accordéonistes chroma non collectés par les revivalistes, juste parce qu'ils ne jouaient pas le "bon système".
Voilà, ceci étant dit... je vais continuer à lire ce livre !!!