Me revoilà. C'est bien, une semaine après avoir posté mon dessin, je constate que Tradzone n'a pas implosé. Je m'en vais donc continuer mon délire pseudo-scientifique, et faire quelques remarques sur ce dessin,
au cas où des experts tombent sur ce topic (pour pas qu'ils me prennent pour un hérétique...)Ce dessin, qui est une grosse blague parce que apparemment scientifique (alors qu'il ne l'est bien sûr pas du tout) montre les 3 principaux courants actuels (ou les 3 tendances actuelles) du revivalisme non spectaculaire. Là déjà, on peut discuter parce qu'il manque des choses : le néofolklore (qui dérive du folklore), le trad mystico-médiéval, etc. On peut aussi discuter de la « largeur » des courants et de leur évolution (bien qu'à mon avis on ne peut nier par exemple qu'il y a en ce moment une sacrée expansion du néotrad). En fait, pour rigoler, j'ai fait un autre croquis chez moi en essayant d'intégrer tous les courants revivalistes (ça commence en 1881 avec le premier groupe folklorique) mais je le garde pour moi, c'est un peu foireux.
Là où ça devient carrément fumeux, c'est quand je mets des noms de groupes dans chaque courant comme je l'ai fait. J'ai pris soin de laisser de côté quelques groupes qui posent problème, car certains se baladent d'un courant à l'autre. Et on peut même discuter la place de certains groupes qui apparaissent sur le dessin (Hamon-Martin Quintet, sur certains morceaux, c'est quand même parfois très folk, voire néotrad ; exemple : le génial morceau Banian's jig). Je n'ai pas mis de noms de personnes, et pour cause : les individualités se promènent aisément d'un courant à l'autre. Un cas fréquent, c'est le folkeux des années 70 qui passe dans le courant trad, du genre Eric Montbel. Bref, c'est le bordel, on fait pas toujours rentrer les gens dans des cases comme on veut.
Plusieurs remarques :
Concernant l'esthétiqueL'esthétique des groupes (le choix des arrangements ou l'instrumentation par exemple), n'intervient pas ici dans la généalogie.
Quelques esthétiques bien identifiables :
- esthétique « folk des années 70 » : jouer un an dro sur une épinette des Vosges (ou une mazurka sur un cromorne, au choix), avec accompagnement de cuillères obligatoire.
- esthétique « folklore » : 15 cabrettes (non accordées entre elles) et 20 chromatiques qui jouent ensemble, tout le temps, toujours en do majeur. On peut y rajouter 10 vielles, ça marche aussi.
- esthétique « néofolklore » : chanter avec une voix d'opérette que c'est loin le pays mais que quand même la cabrette chante dans les coeurs (un p'tit air de cabrette en arrière-plan, très faux). Accompagnement basse-batterie bienvenu.Pour bien faire il faudrait imaginer un graphique en 3D en rajoutant un 3e axe au dessin, pour s'apercevoir que certaines esthétiques transcendent les 3 courants (par exemple on trouve des accompagnements de guitare « pop » en trad, en folk, en néotrad. Ou, en d'autres termes, il y a bien sûr un rapport entre Carré Manchot, Re-fût de chêne et Djal, contrairement à ce que sous-entend le dessin en 2D).
Concernant le tradIl n'existe pas d'esthétique propre au trad : en tant que mélodiste, on peut aborder les musiques traditionnelles de manière pointue en écoutant du collectage, en travaillant un style et un répertoire « de terroir », AVEC des arrangements « à la pointe de la modernité », c'est-à-dire qui empruntent beaucoup aux musiques actuelles. Du coup, « La Machine » c'est trad ! Et oui, je mets Carré Manchot ET les vielleux du Bourbonnais dans la même grande famille. Ces deux groupes diffèrent par l'esthétique simplement. Mais la démarche est grosso modo la même : un répertoire constitué de morceaux trad anciens et de compos, un style faisant référence à un terroir particulier, etc.
Concernant le folkOn notera qu'il existe une grosse différence esthétique entre le folk des années 70 et le folk actuel (quoique... il y a toujours des fans de l'épinette et des cuillères). J'ai eu énormément de mal à trouver des groupes folk emblématiques des années 90... Il devait bien y en avoir ! Mais j'ai l'impression que les années 2000 ont vu l'émergence de groupes de folk pour la danse de qualité (c'est complètement subjectif, j'assume), en se détachant par ailleurs complètement de l'esthétique « folk des années 70 ». J'ai aussi l'impression que de plus en plus de musiciens qui jouent du folk proviennent de la mouvance trad, ce qui veut dire qu'ils arrivent dans le folk avec un travail antérieur sur un style traditionnel. La qualité que je perçois provient à mon avis beaucoup de là.
Concernant le néotradL'appellation de « néotrad » n'est tout de même pas très heureuse, « néofolk » aurait été plus approprié (ou garder « folk progressif »). Si « néo » désigne un ancrage fort dans le présent et le métissage avec les musiques actuelles, alors le néotrad, finalement, ça serait par exemple La Machine... Mais bon, ce néologisme a un sens bien précis et on ne va pas tout révolutionner maintenant !
Voilà typiquement le genre de logorrhée qui ne doit PAS se retrouver dans Tradmag ou sur wikifolk... En tout cas, ce topic a visiblement donné envie à certains tradzonards de lire Yvon Guilcher, et ça tombe bien parce que c'était le but recherché !
En cherchant sur le site de ma librairie préférée, et en tapant Guilcher, je suis tombée là-dessus :
"Danse traditionnelle et anciens milieux ruraux français" de Jean-Michel Guilcher. Parution : Mai 2009.
Je vous mets le lien : http://www.sauramps.... ... hoix=fiche
Excellent, merci Madras !!