Elfi, je crois rêver... il me semble que tu compares la danse country avec certaines performances folklorique scéniques en costume ?
Mets-tu sur le même plan le costume d'atelier et de bal de certains danseurs de country avec les costumes des groupes folkloriques de reconstitution, ou bien avec la mode vestimentaire des bals folks: pantalon bouffant pour les uns, gilet 1900 pour les autres ? C'est vrai que nous avons un certain décorum, mais il reste léger, non partagé et au libre choix de chacun, c'est un espace de liberté. Par contre, quand tu regardes les reportages de TF1, oui, tu te dis qu'à tout prendre, mieux vaut la tenue (partielle) de cowboy que le costume des dames du Bourbonnais.
Mets-tu sur le même plan les effectifs de la fédé de country avec ceux des pratiquants indépendants ou en associations qui gravitent autour des musiques trads ? La France n'est pas la Bretagne, tu le sais bien ! C'est ce qui me fait croire qu'un bal country ou un festival de country, ce n'est pas représentatif du pratiquant moyen. Je pense que vu le nombre d'affiliés à la fédé (je n'ai pas trouvé les chiffres), seuls les plus mordus et présumément les meilleurs vont s'y retrouver, en attendant de faire le voyage aux States. Seuls les plus mordus vont être filmés par TF1 pendant leur weekend barbecue dans un ranch de Normandie. Mon expérience ce serait plutôt la démonstration d'une line dance sur estrade entre l'asso de dance moderne et les mini miss-ta ville (et possiblement le groupe folklorique local). Et là, le niveau est très, très... comparable à celui des formations qui les précèdent et qui les suivent sur l'estrade (d'où la saillie "GRS, spartakiades,...", ce qui est complètement dégueulasse pour la GRS et les spartakiades d'antan, je l'avoue)
Mais ta réponse m'a fait reconsidérer ma formulation et même mes idées que je vais donc un peu développer.
Je numérote pour faciliter la contradiction.
1) Je commence par revenir sur la qualité de danse et sur la grace du mouvement. Je joins une video d'un bal country. J'admets de bon coeur que ça y danse (je n'ai pas choisi n'importe quoi aussi).
- le décorum (je n'y reviens pas);
- une prédominance des line dance; il y a quelques danses de couple et en cortège, mais le gros du répertoire semble être semblable à ce que nous connaissons comme le madison. Mémorisation et capacité à exécuter de manière rapide un agencement complexe de pas simple sont demandées au danseur.
- une disparité des niveaux, comme dans les bals folk;
Mais que lis-je sur l'Internet ? "même les plus mauvais danseurs peuvent y arriver ! Il n'y a qu'une règle à respecter : être en groupe. Avec un déguisement, c'est encore mieux !" ...
Ah non ! Ça c'est le crédo officieux du Harlem Shake. Je vous ai bien eu... là, on est clairement un cran au dessus.
2) Quant à être tolérant, je ne porte pas de jugement de valeur sur les danses non estampillées "trad européen". Comme il est dit plus haut, le répertoire cajun, mais aussi québécois, les contras et les contredanses galloises (bien européennes, mais je vais les mettre avec les contras pour marquer le pont transatlantique) ont chacun leur caractère qui peut attirer ou pas. Mais ils viennent de quelque part. Avec la country, nous avons affaire à des chorégraphies récentes, une sorte de "digest" déconnecté de sa propre culture. Je me demande si de la zumba bien menée, ce ne serait pas mieux pour le corps ?
3) Sur les vidéos de line dance (mais les autres danses ont l'air d'être abordées dans le même esprit), j'arrive parfaitement à voir un danseur habile, à l'aise et gracieux (encore une fois, il faut regarder les animateurs ou des videos de concours de niveau régional, ou se rendre au festival de Nantes). J'y vois une habitation de la danse, une personnalisation de la posture, mais c'est tout. Même les danses bretonnes sont mieux traitées. Ça peut être un beau ballet d'ensemble, mais l'individu ? Ce serait un peu comme si le répertoire de nos bals était un ensemble de chorégraphies, dansées la plupart du temps machinalement et sans grace, avec la qualité que vous reprochez aux mauvais groupes folkloriques. Le sentiment d'accomplissement semble naître de la satisfaction d'avoir participé à une chorégraphie parfois difficile (rapide, etc.). Attention ! Ne dites pas: "Oui, mais les Bretons !? Oui mais les Basques !?" On ne parle pas de scène ou de fête patronale (ou d'animation pour touristes). Vous avez déjà vu un bon danseur Basque s'amuser en situation de bal ? Ça marque, comme partout ailleurs ! Alors oui, cette mode de la country, je la vis mal (mais ils ne m'ont rien fait), je la vois au mieux comme un révélateur sociétal. Des gens qui souffrent comme nous inconsciemment de l'état du monde, mais à qui on a proposé quelque chose d'accès plus facile (pas de cabrette). Heureusement, nous n'en sommes pas là dans nos bals et ateliers, même en Bretagne. Mais ça donne à réfléchir.
4) *Peu de musique vivante.* En revanche, la playlist est consultable sur le site des organisateurs. Nous devrions peut-être nous en inspirer. Quand je pense à tous ces commentaires critiques qu'ils s'évitent sur leurs musiciens... Quand je pense à toute cette surface de danse qu'ils gagnent, sans les groupies...
5) *Peu de contact entre les danseurs.* En France, nous avons revivalisé un peu partout quelques rondes, des danses de couple fermé (qui perdurent dans les autres types de bals). Nous avons certes des danses ouvertes, mais elles ne sont jamais des danses de masse. Le madison occasionnel n'est pas représentatif. C'est louche des gens qui ne partagent pas leur transpiration ni leurs sourires.
Que dire de plus ? Que c'est convivial, bon-enfant, ouvert ? Que c'est préférable à la danse individuelle peu technique que l'on pratique en d'autres lieux ? Que vu l'ampleur du phénomène de mode, ça peut être un atout pour nous dans le sens où des danseurs débutants peuvent s'y dégourdir les esgourdes et les gambettes avant de tomber sous le charme de nos chapeloises ?
Question que je me pose à moi-même après ce "rant":
"Mais mon bon Rodrigue, ces gens-là qui s'amusent comme des fous à pratiquer ces line dances en toute convivialité, à quoi les voues-tu du plus profond de ton ire ? Bah au trad... Au pire, ils s'amuseront comme des fous en toute convivialité."