Alors entre Boutoneux qui ne va jamais au bal ni au concert mais qui revendique brutalement son droit de dire (sans rien nous dire!) sur quelle musique les gens doivent danser, Philippe qui ne lit pas tradmag mais qui débat dedans et qui ne connaît pas les jeunes acteurs du trad tout en les critiquant, Cmtrl qui nous parle de pèlerinage au lieu de musique... Bref, y a quelque chose qui me brûle les lèvres depuis un moment mais bon tant pis j'ose: "....Ah putain que ça a l'air dur de vieillir!..."
Philippe, tu demandes à être rassuré... A votre tour, rassurez-nous les tontons folkeux. Dites-nous que vous n'êtes pas tombé dans le piège de la stigmatisation de la jeunesse qui explore d'autres pistes et qui s'approprie les choses à sa manière... Bref tout ce que vous avez vous aussi revendiqué à un moment...
Je crains qu'il n’y ait quelque chose qui t'échappe... dans tes critiques de Boutoneux, de Philippe et des autres.
Par définition, la (vrai) musique traditionnelle (pas le néofolk/trad) relève d'un enracinement local, d'un lien culturel, linguistique, mental etc. ... et pas d'une vision soit parisienne, soit "française". Justement si un individu est particulièrement attaché à sa culture locale, à sa musique locale, il peut ignorer ou n'avoir pas le temps de s'intéresser à ce qui se fait dans la France standard du folk, qui va au bal folk « normalisé ». Selon l’endroit où il vit, il va plutôt s’intéresser soit à des baletis, à des bals auvergnats ou à des festoù-noz ... voire n’y aller que pour écouter un peu la musique, ne pas forcément danser, mais discuter avec les copains du cru. En ce sens, il sera attaché à une musique traditionnelle (à nuancer) PARTICULIERE, qui relève de son identité.
Alors ce qui se passe dans les bals folks ou dans les musiques des autres coins, il n’a pas forcément le vibrato, le feeling, c’est pas une culture qui l’accroche, ça l’intéresse pas, il n’a pas le temps... c’est respectable.
C’est justement ces particularismes qui font l’intérêt de la musique trad. Ce n’est pas de tous danser rigoureusement la même chose dans tous les bals folks, mais de danser plutôt du breton local dans un coin de Bretagne, de danser plutôt du basque ou du Béarnais en Gascogne etc.
Donc si je suis gascon, il n’est pas anormal de ne m’intéresser qu’à ce qui se fait culturellement en Gascogne, à la musique du coin. Et je peux n’en avoir rien à faire de ce qui se fait dans le bal folk moyen en France.
Et puis, le bal folk MC Do avec les mêmes cinq ou six danses de base n’importe où dans l’hexagone, ça va un peu... on s’en lasse vite. Si tu viens d’arriver dans les danses folk/trad, tu verras dans 5 ou 6 ans... on en reparle ! Tu seras gavé de toujours faire la même chose. Par contre si, moi je fais l’effort d’apprendre à danser (un minimum), et que je vais à un bal plutôt alsacien, puis quelques temps après à un bal auvergnat, j’aurais toujours du plaisir... si j’aime bien l’Alsace et l’Auvergne, et que j’ai un bon feeling avec le pays et les gens !
C’est rassurant de se dire que c’est un truc de vieux. Pour s’approprier quelque chose à sa manière, il faut déjà dans une première étape... se l’approprier simplement (codes, logiques, sensibilité, technique etc.). C’est facile de faire évoluer ce qu’on ne connaît pas : moins on connait une musique, et plus on peut facilement la faire (soi-disant) évoluer, et faire... ce qu’on veut... en laissant libre cours à son imagination. Je crois avoir lu que si Stivell avait pu faire évoluer la musique bretonne, c’est qu’il avait pratiqué la musique bretonne trad pendant des années (fest-noz, bagads et musiques).
Tu dis : « la jeunesse qui explore d'autres pistes et qui s'approprie les choses à sa manière... Bref tout ce que vous avez vous aussi revendiqué à un moment... »
Et bien non ! Je n’en suis pas si sûr. Au même âge que toi, ceux que tu qualifies de vieux, ont eu peut-être la chance de découvrir une culture, des musiques trad qui avait encore une certaine existence (d’où les collectages qui n’ont souvent plus beaucoup de sens aujourd’hui). Au départ, c’est évident, ils ont d’abord cherché à s’amuser, à brancher des filles... Mais avec le temps, les particularismes qu’ils ont été obligés de constater (danses et musiques spécifiques et « trad »), les ont conduits à s’interroger sur ce qui avait derrière. Et ils ont essayé de comprendre cette identité, de mieux prendre connaissance de cette culture locale (qui ne se limite pas à la musique, et qui oblige à se poser des questions politiques comme l’évoque crmtlimousin)... Et ils ont une forcément autre perception que toi, moins néo-trad/folk.
D’accord, ils n’ont pas forcément du mérite... c’est lié à la période à laquelle ils ont découvert le trad/folk.
L’important c’est d’essayer de comprendre leur point de vue... qui n’est pas si incohérent !